Droit de réponse
A Monsieur Francky BENE , suite à l’article retranscrit sur le site Camer.be, le 06 Juillet 2014 et intitulé << Serment d’Hypocrite >>
J’ai ressenti une profonde injustice à la limite de l’indignation en le consultant ce jour. Ayant été personnellement indexé par celui-ci sans aucune forme de réserve, en ma qualité de Docteur en Médecine. Voici Monsieur, sans fioritures et toutes politesses conservées ce que votre article m’inspire :
Comme vous l’aurez sans doute remarqué peu de professionnels de la santé ont fait écho de votre article incongru qui, ma foi, dénote d’une déliquescence intellectuelle et d’un certain amateurisme journalistique. Permettez-moi donc de me sentir dans l’obligation d’édifier votre esprit peu éclairé sur un certain nombre de points:
– Vous semblez l’ignorer, beaucoup de camerounais de manière spontanée s’orientent vers des cliniques privées, parce que le service y est personnalisé, et l’attente moins longue; Ceci dû en majeure partie à la très grande différence des effectifs de patients pris en charge. De plus, un certain nombre de commodités essentielles pour le diagnostic et le traitement des patients relève très souvent de structures privées, je vous le concède. Je puis vous assurer que la compétence et le respect de la déontologie médicale ne diffère pas selon que la structure, lorsqu’elle est licite je le précise, soit privée ou pas. Je vous invite donc à ne pas confondre l’exercice illégal de la médecine dans des structures non homologuées par des prestataires hasardeux et la pratique de la Médecine en privée dans des Cliniques bien identifiées tenues par des Médecins. Bien que le décès en clinique privé soit mal vu et vécu, soyez assurés que l’on décède tout autant voir plus dans les hôpitaux publics. Il faut mettre dans la balance pour comprendre cette situation, les notions très pointues de pronostic, de gravité, de promptitude, de délai, de disponibilité, de curabilité, encore plus que le stéréotype aisé d’engager la responsabilité directe du prestataire surtout lorsque celui-ci est assermenté.
Je tiens également à vous préciser que l’exercice de la médecine en clientèle privée n’est pas toujours totalement incompatible avec le service public sous réserve d’un certain nombre de dérogations prévues par la loi N° 90-36 DU 10 AOUT 1990 relative à l’exercice et à l’organisation de la profession de Médecin.
– J’ai été quelque peu ahuri et amusé, par le tableau terne et sans valeur que vous dépeignez des cliniques privées au Cameroun. Je vous cite: « Et pour attirer les malades dans leurs officines souvent sises dans des maisons banalisées et souvent famées de Yaoundé ou de Douala, ces praticiens d’un genre nouveau ont recours à des rabatteurs très futés ». Permettez moi de vous renvoyer aux dictionnaires car le terme « officines » n’est pas synonyme de « cliniques », et je suppose que par ‘’famées’’ vous vouliez dire « malfamées ». Votre usage prosaïque, de la langue française m’émeut au plus haut point et je dois le dire me donne des vertiges. Je vous enjoint à visiter pour exemples, sans publicité, en toute liberté la Clinique de la Cathédrale, Celle du Jourdain à Yaoundé, la Clinique Muna et celle de l’Odyssée à Douala, pour vous rendre compte à quel point votre discours est infamant et calomnieux.
– La réglementation en matière de rémunération des médecins exerçant dans le privé est régie en toute légalité par des textes du Syndicat national des médecins privés du Cameroun (SNMPC). Ces tarifs sont compris entre 6000 FCFA et 15.000 FCFA par consultation en fonction de la spécialité du Médecin et peuvent doubler en cas d’urgence ou de Consultation de nuit. Il en est de même pour les opérations chirurgicales M. Béné. La médecine est certes une vocation, mais c’est également un métier qui exige une rétribution en contrepartie d’une expertise. Vous nous excuserez de ne pas nous apparenter à des cordonniers mal chaussés ou des bon samaritains qui refusent tout salaire. Il n’en demeure pas moins qu’à l’instar de toutes les autres professions, la nôtre est gangrénée par des mafieux qui usent de rabattage et autres pratiques qui ne sauraient être assimilables à « tous les médecins ». Vous avez jeté là, M. Béné, le bébé avec l’eau de son bain.
– Combien de médecins donnent de leur propre sang pour transfuser des malades ? Combien de quêtes sont organisées afin de subvenir aux besoins de personnes indigentes? Combien de campagnes de santé quasi-gratuites et bénévoles sont organisées dans des villages ? Combien de médecins travaillent au quotidien dans des associations caritatives et des ONG? Combien mènent des combats politiques et des plaidoyers pour améliorer le sort réservé à leurs compatriotes? Des « Dr Georges Bwellé » M. Béné, dans l’ombre comme dans la lumière, il y’en a des centaines. Aucune autre profession ne peut autant se targuer d’améliorer la qualité de vie de nos concitoyens quotidiennement.
Ceci n’est pas de la rhétorique populiste. Voilà la vérité, elle est bruyante, Non, M. Béné elle est assourdissante!!
– Les règles douteuses de votre rédaction et le raisonnement scientifique qui vous échappe, vous affublent de tares très loin de l’éthique basique du journalisme régenté majestueusement par la Charte de Munich dont vous ignorez très certainement l’existence. Il s’agit notamment de la propension à généraliser les particularités, l’absence de vérification des faits dans leur globalité, des allégations diffamantes. Le Serment d’Hippocrate dont vous énoncez les préceptes si « savamment » m’est totalement étranger et je vous prie de m’en instruire la source en espérant que différence soit faite entre le Serment prêté et le livre dont celui-ci est issu. Echange de bons procédés, je vous renvoie concomitamment à la Déclaration de Genève amendée en 2006 par l’Association médicale mondiale qui est le Serment prêté par les Médecins camerounais actuellement ou encore au Serment original traduit par Emile Littré.
– Le perfectionnement de notre système de santé dépend d’abord de l’orientation des pouvoirs publics et il ne peut avoir lieu sans progrès social. L’amélioration de la qualité des soins passe par le relèvement du plateau technique, du standing et de la qualité du service public (accueil, coût, qualité, capacité); La construction de formations sanitaires de référence dans les zones lésées; Le bon management des ressources humaines en vue d’améliorer le ratio médecin/malades; La lutte contre l’exercice illégal de la médecine et les prestataires véreux; Un partenariat privé-public efficient, mais aussi la promotion de la sécurité sociale pour tous . La médecine est M. Béné, l’une des rares professions où l’excellence est une exigence déontologique. Les professionnels ont obligation de résultats certes, mais également de moyens, ceci du fait du caractère sacré inhérent à la vie humaine.
Voilà M. Béné , votre tentative de nuire à la noblesse et au prestige de la profession médicale est réduite en cendres. La Santé est un domaine trop complexe, avec trop de hauteur et de sérieux pour y pratiquer comme vous l’avez fait un funambulisme de plume cassée.
Je vous exhorte donc amicalement à quitter les rangs de l’analyse superficielle, de la propagande mensongère, pour rejoindre ceux d’une école de journalisme que vous avez probablement quitté trop tôt voire jamais côtoyé.
Quant à moi, comme dirait Hippocrate: « Je passerai toute ma vie et exercerai mon art dans l’innocence et la pureté »
Cordialement
Dr Jacques Olivier Tonye « Hypocrite malgré lui »
10 juillet 2014